Corpus Christi by Gérard Mordillat & Jérôme Prieur

Auteur:Gérard Mordillat & Jérôme Prieur [Prieur, Gérard Mordillat & Jérôme]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Arte Éditions/Mille Et Une Nuit
Publié: 1997-04-14T16:00:00+00:00

Emmaüs

Dans les Actes des apôtres, au chapitre I, les apôtres posent à Jésus ressuscité la question : « Seigneur, est-ce maintenant le temps où tu vas restaurer la royauté d’Israël ? »

Déjà, dans l’Évangile selon Luc, au chapitre 24, sur la route d’Emmaüs, deux pèlerins exprimaient leur déception après la mort de Jésus : « Nous espérions, nous, que c’était lui qui allait délivrer Israël »...

L’interrogation majeure concerne donc Israël.

D’ailleurs, le lieu même de la rencontre entre les pèlerins et le ressuscité n’est pas fortuit. Emmaüs marque l’endroit exact de la première victoire de Judas Macchabée avant qu’il ne reconquière Jérusalem. Judas Macchabée qui, aux alentours de 160 de notre ère, prendra la tête du soulèvement juif contre les Séleucides de Syrie et régnera sur Israël. Le parallèle entre Jésus et Judas Macchabée induit par le texte est d’autant plus patent que les indications géographiques données par l’évangéliste sont très incertaines, voire totalement fantaisistes.

Ce ne sont pas à elles qu’il faut prêter attention, c’est évidemment aux références bibliques d’un lieu chargé d’un passé glorieux. La route d’Emmaüs, c’est la route de la victoire promise, le symbole de la délivrance d’Israël.

Que l’on se place d’un point de vue strictement religieux ou d’un point de vue plus largement politique, l’inscription portée sur le titulus selon tous les Évangiles confirme que les Romains ont voulu, en crucifiant le roi des Juifs, supprimer un homme qui portait l’espérance d’Israël.

Cette espérance s’opposait à la domination des Romains sur les Juifs. Peu importe dès lors qu’elle s’y opposât par la parole, par les armes, par l’annonce d’un grand miracle...

En somme, Jésus n’a été victime d’une erreur judiciaire que d’un point de vue chrétien, c’est-à-dire d’un point de vue exprimé de façon postérieure aux faits.

Il faut sans cesse garder présent à l’esprit que, du temps de Jésus, les Romains ne sont pas chrétiens et que les chrétiens (même s’ils ne portent pas encore ce nom) sont des Juifs ! La force de la chrétienté sera de renverser cette image, de christianiser les Romains et d’arracher Jésus et ses disciples au judaïsme.

En revenant au Ier siècle, il faut comprendre que, du point de vue romain, Jésus a été exécuté comme Juif rebelle à l’ordre impérial et que, d’un point de vue juif, il est mort pour la cause d’Israël, comme sont morts tant d’autres opposants à Rome et aux hérodiens...

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